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XXIV

LE SALON DE Mme DE SAINT-MORRIS.


À dix heures, une longue file de voitures stationnait aux abords d’un petit hôtel de la rue de Rome, portant le numéro 15, dont les fenêtres étaient splendidement éclairées. Une grande réception avait lieu ce jour-là chez la vicomtesse de Saint-Morris, une des personnalités féminines le plus en renom dans un de ces mondes des indéfinissables qui florissaient à Paris sur la fin du second empire.

Veuve d’un ancien consul de France à Buenos-Ayres, dont elle ne portait pas le nom, et qui s’était séparé d’elle au bout de deux ans de mariage, à la suite d’un procès scandaleux, la vicomtesse recevait une société extrêmement mêlée, des gens du monde, des artistes, des notabilités financières et politiques, beaucoup d’étrangers de distinction et quelques excentriques. Elle donnait des raouts, des bals, des concerts, où les jeunes gens s’amusaient fort, car il y régnait un abandon peu ordinaire, et l’on y rencontrait de fort belles personnes.

Par une exception assez rare chez les femmes d’un