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les conjurés, tous coiffés de bonnets rouges et armés jusqu’aux dents, s’engageaient par des serments solennels à consommer leur forfait. Les agents de police ont eu à soutenir une lutte meurtrière. Un homme a été tué, deux blessés… » ― « Voilà comment le parti démagogique témoigne à l’empereur la reconnaissance de ses bienfaits. »

― Et vous n’avez pas pu faire une arrestation, pas une seule ?

― Ce n’est pas moi qui ai dirigé l’escouade, monsieur le directeur le sait, répondit le chef de bureau.

― Et ce Barbaro qu’on ne peut interroger, c’est déplorable ! c’est déplorable ! répétait M. Bonafous en frappant de la main sur la table. L’officier de paix qui a si bêtement conduit cette expédition sera révoqué. En attendant, tout me retombe sur le dos. On a tiré un coup de feu dans la maison, et nous ne savons rien. C’est déplorable !

Or, ce que M. Bonafous ne savait pas, nous pouvons l’apprendre au lecteur.

Un coup de feu avait en effet retenti, comme on se le rappelle, au premier étage pendant l’invasion de la police dans les appartements du cercle ; mais il n’avait pas été tiré sur les agents. Coq, armé d’un pistolet, suivait Barbaro, prêt à faire feu sur lui, s’il découvrait sa trahison. Gêné par ce voisinage menaçant, Barbaro avait fermé brusquement la porte derrière lui, en passant d’une pièce dans une autre. Le choc avait fait sauter le pistolet de sa main et partir la détonation, tandis que le malheureux Barbaro, précipitant sa fuite au hasard, était tombé dans l’escalier de la cave, où on le releva à demi mort.