Page:Maurice Denis Théories (1890-1910)-1920.djvu/21

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

XV

« L’art, c’est quand ça tourne », autre définition d’un égaré.

N’est-ce pas de Paul Gauguin, cette ingénieuse et inédite histoire du modelé ?

À l’origine, l’arabesque pure, aussi peu trompe-l’œil que possible ; un mur est vide : le remplir avec des taches symétriques de forme, harmonieuses de couleurs (vitraux, peintures égyptiennes, mosaïques byzantines, kakémonos).

Vient le bas-relief peint (les métopes des temples grecs, l’église du Moyen-Age).

Puis l’essai de trompe-l’œil ornemental de l’antiquité est repris par le xve siècle, remplaçant le bas-relief peint par la peinture au modelé de bas-relief, ce qui conserve d’ailleurs l’idée première de décoration (les Primitifs, se rappeler dans quelles conditions Michel-Ange, statuaire, a décoré la voûte de la Sixtine).

Perfectionnement de ce modelé : modelé de ronde bosse ; cela mène des premières Académies des Carraches à notre décadence. L’Art c’est quand ça tourne.

XVI

On sait que la sculpture française des premiers siècles (type du portail de Vézelay), dérive des enluminures byzantines, point des reliefs. Ce qui fait comprendre l’emploi des plis des toges et vêtements larges pour de simples arabesques, à remplir les vides, — plis dessinés suivant une fantaisie de haut goût et gravés dans la pierre, sans correspondre à une possibilité de draper une robe en la même figure. Paul Sérusier expliquait cette recherche par les Athéné archaïques, les Tanagra, les Victoires du temple de Niké Apteros, toute la statuaire grecque, tout le Moyen-Age, toute la Renaissance. Il ajoutait que ce même souci de remplir les vides, insipides à l’œil normal, qui avait inventé