Page:Maupertuis - Œuvres, Dresde, 1752.djvu/404

37a PREFACE. milité qui (buvent efi : fufpecl :, ou un air d’Oftentation qui toujours révolte. Cependant la manière dont plufieurs Perfonnes ont atta- qué mon Ouvrage me force à entrer ici dans quelques détails. On l’a voulu repréfenter comme un fruit amer de la Mélancolie. Le Public ne fe met gueres en peine de (avoir fi je fuis trille ou fi je fuis gai ; cependant comme cette Idée pourrait prévenir contre l’Ouvrage même , il eft peut-être à propos que ceux qui ne me connoifTent point (cachent, que je ne l’ai écrit ni dans l’exil, ni dans le chagrin : Que c’a été dans mes plus beaux jours, au milieu d’une brillante Cour ; dans le Palais d’un Roi qui m’a placé dans un état fort au demis de ce que j’aurois pu efperer. Si dans cette iituation, j’ai trouvé encore des ennuis dans la vie, cela même ne doit -il pas me perfuader qu’aucune vie n’en ed ; exemtc. On a paru choqué du Plan de mon Ouvrage, comme fi je m’é- tois propoie de faire haïr la vie. Le Poète ou l’Orateur qui par des peintures plus vives que fidèles, voudrait répandre fur nos jours, plus de trirtefle qu’il n’y en a, ferait blâmable ; mais le PhiloJbphe qui compte et pèse les peines & les plaifirs l’eft-il ? Et celui qui trouve mauvais qu’on lui préfente ce calcul , ne reflemble - 1 - il pas à un homme dérangé qui fc fâche, lorfque (bn Intendant lui fait voir le compte de (à depenfc & de (es revenus ? Nous lifons dans l’Hiftoire de la Philofophie qu’Hcgcfias avoit fait un livre où il reprélèntoit fi bien tous les Maux de la Vie , que plufieurs ne vouloient plus vivre après l’avoir lu. Ptolomée pro- ferivit le livre , & défendit à l’Auteur d’enfeigner une telle do- ctrine. Il eut peut-être raifon : ce (èroit un Ouvrage pernicieux que celui qui nous peindrait trop vivement nos Maux, s’il ne nous préfentoit en même tems les motifs qui nous les doivent faire fupporter, & ne nous en indiquoit les remèdes : mais certains Ouv- rages, s’ils ne font pas fi dangereux, font peut-être plus mal faits, dans lefquels après avoir déduit de la Philofophie toutes les raifons de haïr la vie, l’on tire d’une (burce toute différente les Motifs pour la fupporter. Je n’ai eu dans celui-ci que la vérité pour objet, & que la Philolbphie pour guide. Je n’ai fondé que fur elles le calcul que j’ai