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petites statues des hommes, quelque matiere nouvelle, quelqu’esprit subtil, qui s’insinuant dans leurs membres, leur donne le mouvement, la végétation et la vie. Cet esprit séminal est fourni par le mâle, et est contenu dans cette liqueur qu’il répand avec tant de plaisir. N’est-ce pas ce feu que les Poëtes ont feint que Promethée avoit volé du Ciel pour donner l’ame à des hommes, qui n’étoient auparavant que des automates ? Et les Dieux ne dévoient-ils pas être jaloux de ce larcin ?

Pour expliquer maintenant comment cette liqueur dardée dans le vagin va féconder l’œuf, l’idée la plus commune, et celle qui se présente d’abord, est qu’elle entre jusques dans la matrice, dont la bouche alors s’ouvre pour la recevoir ; que de la matrice, une partie, du moins ce qu’il y a de plus spiritueux, s’élevant dans les tuyaux des trompes, est portée jusqu’aux ovaires, que chaque trompe embrasse alors, et pénetre l’œuf qu’elle doit féconder.

Cette opinion, quoiqu’assez vraisemblable, est cependant sujette à plusieurs difficultés.

La liqueur versée dans le vagin, loin de paroître destinée à pénétrer plus avant, en retombe aussi-tôt, comme tout le monde sait.

On raconte plusieurs histoires de filles devenues enceintes sans l’introduction même de ce qui doit verser la semence du mâle dans le vagin, pour avoir seulement laissé répandre cette liqueur sur ses bords. On peut révoquer en doute ces faits, que la vue du Physicien ne peut guere constater, et sur lesquels il faudroit en croire les femmes, toujours peu sinceres sur cet article.

Mais il semble qu’il y ait des preuves plus fortes qu’il n’est pas nécessaire que la semence du mâle entre dans la matrice pour rendre la femme féconde. Dans les matrices de femelles de plusieurs animaux disséquées après l’accouplement, on n’a point trouvé de cette liqueur.

On ne sauroit cependant nier qu’elle n’y entre quelquefois. Un fameux Anatomiste[1] en a trouvé en abondance dans la matrice d’une genisse qui venoit de recevoir le taureau. Et quoiqu’il y ait peu de ces exemples, un seul cas où l’on a trouvé la semence dans la

  1. Verheyen.