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bitez de vastes palais, vous vous promenez dans des jardins délicieux, vous possédez tous les trésors de l’Asie ; le dernier de vos esclaves qui peut goûter ces plaisirs est plus heureux que vous. Mais vous que la cruelle avarice de vos parens a sacrifiés au luxe des Rois, tristes ombres qui n’êtes plus que des voix, gémissez, pleurez vos malheurs, mais ne chantez jamais l’amour.

C’est cet instant marqué par tant de délices qui donne l’être à une nouvelle créature, qui pourra comprendre les choses les plus sublimes, et, ce qui est bien au-dessus, qui pourra goûter les mêmes plaisirs.

Mais comment expliquerai-je cette formation ? Comment décrirai-je ces lieux qui font la premiere demeure de l’homme ? Comment ce séjour enchanté va-t-il être changé en une obscure prison habitée par un embryon informe et insensible ? Comment la cause de tant de plaisir, comment l’origine d’un être si parfait n’est-elle que de la chair et du sang[1] ?

Ne ternissons pas ces objets par des images dégoûtantes : qu’ils demeurent couverts du voile qui les cache. Qu’il ne soit permis d’en déchirer que la membrane de l’hymen. Que la biche vienne ici à la place d’Iphigénie. Que les femelles des animaux soient désormais les objets de nos recherches sur la génération : cherchons dans leurs entrailles ce que nous pourrons découvrir de ce mystere ; et s’il est nécessaire, parcourons jusqu’aux oiseaux, aux poissons et aux insectes.


CHAPITRE II

Systême des anciens sur la génération.


Au fond d’un canal que les Anatomistes appellent vagin, du mot latin qui signifie gaine, on trouve la matrice : c’est une espece de bourse fermée au fond, mais qui présente au vagin un petit orifice qui peut s’ouvrir et se fermer, et qui ressemble assez au bec d’une tanche, dont quelques Anatomistes lui ont donné le nom.

  1. Miseret atque etiam pudet æstimantem quam sit frivola animalium superbissimi origo ! C. Plin. Nat. hist. l. VII. c. 7.