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suite les intimes, et, à l’occasion, les cousins éloignés des riches parvenus, gentilshommes déclassés, ruinés, tachés, mariés parfois, ce qui est pis. C’étaient M. de Belvigne, le marquis de Banjolin, le comte et la comtesse de Ravenel, le duc de Ramorano, le prince de Kravalow, le chevalier Valréali, puis des invités de Walter, le prince de Guerche, le duc et la duchesse de Ferracine, la belle marquise des Dunes. Quelques parents de Mme Walter gardaient un air comme il faut de province, au milieu de ce défilé.

Et toujours les orgues chantaient, poussaient par l’énorme monument les accents ronflants et rythmés de leurs gorges luisantes, qui crient au ciel la joie ou la douleur des hommes. On referma les grands battants de l’entrée, et, tout à coup, il fit sombre comme si on venait de mettre à la porte le soleil.

Maintenant Georges était agenouillé à côté de sa femme dans le chœur, en face de l’autel illuminé. Le nouvel évêque de Tanger, crosse en main, mitre en tête, apparut, sortant de la sacristie, pour les unir au nom de l’Éternel.

Il posa les questions d’usage, échangea les anneaux, prononça les paroles qui lient comme des chaînes, et il adressa aux nouveaux époux une allocution chrétienne. Il parla de la fidélité, longuement, en termes pompeux. C’était un gros homme de grande taille, un de ces beaux prélats chez qui le ventre est une majesté.

Un bruit de sanglots fit retourner quelques têtes. Mme Walter pleurait, la figure dans ses mains.

Elle avait dû céder. Qu’aurait-elle fait ? Mais depuis le jour où elle avait chassé de sa chambre sa fille revenue, en refusant de l’embrasser, depuis le jour où elle avait dit à voix très basse à Du Roy, qui la saluait avec cérémonie en reparaissant devant elle : — Vous êtes l’être le plus