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cowitch était très étonnant ; et ils revinrent. Ils avaient perdu le mari.

Il demanda :

— Et Laurine, est-ce qu’elle m’en veut toujours ?

— Oui, toujours autant. Elle refuse de te voir et s’en va quand on parle de toi.

Il ne répondit rien. L’inimitié subite de cette fillette le chagrinait et lui pesait.

Suzanne les saisit au détour d’une porte, criant :

— Ah ! vous voilà ! Eh bien, Bel-Ami, vous allez rester seul. J’enlève la belle Clotilde pour lui montrer ma chambre.

Et les deux femmes s’en allèrent, d’un pas pressé, glissant à travers le monde, de ce mouvement onduleux, de ce mouvement de couleuvre qu’elles savent prendre dans les foules.

Presque aussitôt une voix murmura : — Georges ! — C’était Mme Walter. Elle reprit très bas : — Oh ! que vous êtes férocement cruel ! Que vous me faites souffrir inutilement. J’ai chargé Suzette d’emmener celle qui vous accompagnait afin de pouvoir vous dire un mot. Écoutez, il faut… il faut que je vous parle ce soir… ou bien… ou bien… vous ne savez pas ce que je ferai. Allez dans la serre. Vous y trouverez une porte à gauche et vous sortirez dans le jardin. Suivez l’allée qui est en face. Tout au bout vous verrez une tonnelle. Attendez-moi là dans dix minutes. Si vous ne voulez pas, je vous jure que je fais un scandale, ici, tout de suite !

Il répondit avec hauteur :

— Soit. Je serai dans dix minutes à l’endroit que vous m’indiquez.

Et ils se séparèrent. Mais Jacques Rival faillit le mettre en retard. Il l’avait pris par le bras et lui racon-