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saillie, le sourcil en arc de cercle. Il cria, en arabe :

— Que voulez-vous ?

Mohammed, arrêtant net son cheval, lui répondit, dans sa langue :

— C’est toi qui as tué le voyageur anglais ?

L’agha prononça, d’une voix forte :

— Je n’ai pas d’interrogatoire à subir de toi.

C’était autour de nous comme une tempête grondante. Les Arabes accouraient de tous les côtés, nous pressaient, nous enfermaient, vociféraient.

Ils avaient l’air d’oiseaux de proie féroces avec leur grand nez recourbé, leur face maigre aux os saillants, leurs larges vêtements agités par leurs gestes.

Mohammed souriait, son turban de travers, l’œil excité, et je voyais comme des frissons de plaisir sur ses joues un peu tombantes, charnues et ridées.

Il reprit, d’une voix tonnante qui domina les clameurs :

— La mort à celui qui a donné la mort !

Et il tendit son revolver vers la face brune de l’agha. Je vis un peu de fumée sortir du canon ; puis une écume rose de cervelle et de sang jail-