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jusqu’aux toits obliques de la ville européenne. Derrière ceux-ci, on apercevait les mâts des navires à l’ancre, puis la mer, la pleine mer, bleue et calme sous le ciel calme et bleu.

Nous nous étendîmes sur des nattes, la tête soutenue par des coussins, et, tout en buvant lentement le café savoureux de là-bas, je regardais paraître les premières étoiles dans l’azur assombri. On les apercevait un peu, si loin, si pâles, à peine allumées encore.

Une chaleur légère, une chaleur ailée, nous caressait la peau. Et parfois des souffles plus chauds, pesants, où passait une odeur vague, l’odeur de l’Afrique, semblaient l’haleine proche du désert, venue par-dessus les cimes de l’Atlas. Le capitaine, couché sur le dos, prononça :

— Quel pays, mon cher ! comme la vie y est douce ! comme le repos y a quelque chose de particulier, de délicieux ! Comme ces nuits-là sont faites pour rêver !

Moi, je regardais toujours naître les étoiles, avec une curiosité molle et vive cependant, avec un bonheur assoupi.

Je murmurai :

— Vous devriez bien me raconter quelque chose de votre vie dans le Sud.