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La cloche sonna le déjeuner.

Il fut silencieux et presque morne.

Il y avait, comme on dit, de l’orage dans l’air. De grosses nuées immobiles semblaient embusquées au fond de l’horizon, muettes et lourdes, mais chargées de tempête.

Dès qu’on eut prit le café sur la terrasse, la marquise demanda :

— Eh bien ! mignonne, vas-tu faire une promenade aujourd’hui avec ton ami Servigny ? C’est un vrai temps pour prendre le frais sous les arbres.

Yvette lui jeta un regard rapide, vite détourné :

— Non, maman, aujourd’hui je ne sors pas.

La marquise parut contrariée, elle insista :

— Va donc faire un tour, mon enfant, c’est excellent pour toi.

Alors, Yvette prononça d’une voix brusque :

— Non, maman, aujourd’hui je reste à la maison, et tu sais bien pourquoi, puisque je te l’ai dit l’autre soir.

Mme  Obardi n’y songeait plus, toute préoccupée du désir de demeurer seule avec Saval. Elle rougit, se troubla, et, inquiète pour elle-même, ne sachant comment elle pourrait se trouver libre une heure ou deux, elle balbutia :