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YVETTE.

— Je n’avais rien. C’était ça qui m’avait rendue toute chose.

Et la marquise ajouta :

— Nous en reparlerons. Mais, surtout, ne reste plus seule avec lui d’ici quelque temps, et sois bien sûre qu’il ne t’épousera pas, entends-tu, et qu’il veut seulement te… compromettre.

Elle n’avait point trouvé mieux pour exprimer sa pensée. Et Yvette rentra chez elle.

Mme Obardi se mit à songer.

Vivant depuis des années dans une quiétude amoureuse et opulente, elle avait écarté avec soin de son esprit toutes les réflexions qui pouvaient la préoccuper, l’inuiéter ou l’attrister. Jamais elle n’avait voulu se demander ce que deviendrait Yvette ; il serait toujours assez tôt d’y songer quand les difficultés arriveraient. Elle sentait bien, avec son flair de courtisane, que sa fille ne pourrait épouser un homme riche et du vrai monde que par un hasard tout à fait improbable, par une de ces surprises de l’amour qui placent des aventurières sur les trônes. Elle n’y comptait point, d’ailleurs, trop occupée d’elle-même pour combiner des projets qui ne la concernaient pas directement.