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YVETTE.

Il hâtait le pas, vaguement inquiet, haussant toujours le ton :

— Mam’zelle Yvette ! Mam’zelle Yvette !

Rien ; il s’arrêta, écouta. Toute l’île était silencieuse ; à peine un frémissement de feuilles sur sa tête. Seules, les grenouilles continuaient leurs coassements sonores sur les rives.

Alors il erra de taillis en taillis, descendant aux berges droites et broussailleuses du bras rapide, puis retournant aux berges plates et nues du bras mort. Il s’avança jusqu’en face de Bougival, revint à l’établissement de la Grenouillère, fouilla tous les massifs, répétant toujours :

— Mam’zelle Yvette, où êtes-vous ? Répondez ! C’était une farce ! Voyons, répondez ! Ne me faites pas chercher comme ça !

Une horloge lointaine se mit à sonner. Il compta les coups : minuit. Il parcourait l’île depuis deux heures. Alors il pensa qu’elle était peut-être rentrée, et il revint très anxieux, faisant le tour par le pont.

Un domestique, endormi sur un fauteuil, attendait dans le vestibule.

Servigny, l’ayant réveillé, lui demanda :

— Y a-t-il longtemps que Mlle Yvette est revenue ? Je l’ai quittée au bout du pays parce que j’avais une visite à faire.