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2.o6 PROMENADE.

de café, ce qui lui arrivait rarement, et ensuite un petit verre de fine Champagne.

Quand il eut payé, il se sentit tout gail- lard, tout guilleret, un peu troublé même. Et il se dit : « Voilà une bonne soirée. Je vais continuer ma promenade jusqu'à l'entrée du Bois de Boulogne. Ça me fera du bien. »

II repartit. Un vieil air, que chantait autre- fois une de ses voisines, lui revenait obstiné- ment dans la tête :

Quand le bois reverdit,

Mon amoureux me dit :

Viens respirer, ma belle,

Sous la tonnelle.

II le fredonnait sans fin, le recommençait toujours. La nuit était descendue sur Paris, une nuit sans vent, une nuit d'étuve. M. Leras suivait l'avenue du Bois de Boulogne et re- gardait passer les fiacres. Ils arrivaient, avec leurs yeux brillants, l'un derrière l'autre, laissant voir une seconde un couple enlacé, la femme en robe claire et l'homme vêtu de noir.

C'était une longue procession d'amoureux, promenés sous le ciel étoile et brûlant. II en venait toujours, toujours. Ils passaient, pas-