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1/8 L'ABANDONNÉ.

trine roulée dans un tricot brun, terni, lavé par les pluies, roussi par les étés, elle avait l'air d'une pauvre servante, misérable et sale.

— V'ià maman, dit l'enfant.

Quand elle fut près de sa demeure, elle reo-arda les étrangers d'un air mauvais et soupçonneux; puis elle entra chez elle comme si elle ne les avait pas vus.

Elle semblait vieille, avec une figure creuse, jaune, dure; cette figure de bois des campa- gnardes.

M. d'Apreval la rappela :

— Dites, madame, nous sommes entrés pour vous demander de nous vendre deux verres de lait.

Elle grommela, en reparaissant sur sa porte, après avoir posé ses seaux.

— Je n' vends point de lait.

— C'est que nous avons bien soif. Madame est vieille et très fatiguée. N'y a-t-il pas moyen d'avoir quelque chose à boire?

La paysanne les considérait d'un œil inquiet et sournois.

Enfin, elle se décida.

— Pisque vous êtes là, je vas tout de même vous en donner, dit-elle.

Et elle disparut dans son logis.