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YVETTE.

— Jusqu’à me dire toute la vérité, la sale vérité tout entière ?

— Oui, mam’zelle.

— Eh bien, qu’est-ce que vous pensez, au fond, tout au fond, du prince Kravalow ?

— Ah ! diable !

— Vous voyez bien que vous vous préparez déjà à mentir.

— Non pas, mais je cherche mes mots, des mots bien justes. Mon Dieu, le prince Kravalow est un Russe… un vrai Russe, qui parle russe, qui est né en Russie, qui a eu peut-être un passeport pour venir en France, et qui n’a de faux que son nom et que son titre.

Elle le regardait au fond des yeux.

— Vous voulez dire que c’est ?…

Il hésita, puis, se décidant :

— Un aventurier, mam’zelle.

— Merci. Et le chevalier Valréali ne vaut pas mieux, n’est-ce pas ?

— Vous l’avez dit.

— Et M. de Belvigne ?

— Celui-là, c’est autre chose. C’est un homme du monde… de province, honorable… jusqu’à un certain point… mais seulement un peu brûlé… pour avoir trop rôti le balai…