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SUR L’EAU

au conducteur de la diligence, qui en parla au maître de poste, qui en causa avec le directeur ou la directrice du télégraphe, qui s’étonna devant le rédacteur d’un Petit Midi quelconque, qui en fit une chronique à sensation reproduite par toutes les feuilles de la Provence.

La gendarmerie se mit en marche et découvrit le solitaire, sans l’inquiéter d’ailleurs, ce qui prouve qu’il devait avoir gardé ses papiers. Mais un photographe, excité par cette nouvelle, se mit en route à son tour, erra trois jours et trois nuits à travers les montagnes, et finit par photographier quelqu’un, le vrai solitaire, disent les uns, un faux, affirment les autres.

Or l’an dernier, l’ami qui me révéla ce bizarre pays me fit voir deux êtres plus curieux assurément que le pauvre diable qui vint cacher dans ces bois impénétrables un chagrin, un remords, un désespoir inguérissable, ou peut-ètre le simple ennui de vivre.