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SUR L’EAU

La tendresse que nous lui donnons est mêlée aussi de pitié ; nous la plaignons comme une vieille fille, car nous devinons vaguement, malgré les poètes, que ce n’est point une morte, mais une vierge.

Les planètes, comme les femmes, ont besoin d’un époux, et la pauvre lune dédaignée du soleil n’a-t-elle pas simplement coiffé sainte Catherine, comme nous le disons ici-bas ?

Et c’est pour cela qu’elle nous emplit, avec sa clarté timide, d’espoirs irréalisables et de désirs inaccessibles. Tout ce que nous attendons obscurément et vainement sur cette terre agite notre cœur comme une sève impuissante et mystérieuse sous les pâles rayons de la lune. Nous devenons, les yeux levés sur elle, frémissants de rêves impossibles et assoiffés d’inexprimables tendresses.

L’étroit croissant, un fil d’or, trempait maintenant dans l’eau sa pointe aiguë, et il plongea doucement, lentement, jus-