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Toutes me disent, bien qu’écrites par des mains différentes : « Où êtes-vous ? Que faites-vous ? Pourquoi disparaître ainsi sans annoncer où vous allez ? Avec qui vous cachez-vous ? » Une autre ajoutait : « Comment voulez-vous qu’on s’attache à vous si vous fuyez toujours vos amis ; c’est même blessant pour eux… »

Eh bien, qu’on ne s’attache pas à moi ! Personne ne comprendra donc l’affection sans y joindre une idée de possession et de despotisme. Il semble que les relations ne puissent exister sans entraîner avec elles des obligations, des susceptibilités et un certain degré de servitude. Dès qu’on a souri aux politesses d’un inconnu, cet inconnu a barres sur vous, s’inquiète de ce que vous faites et vous reproche de le négliger. Si nous allons jusqu’à l’amitié, chacun s’imagine avoir des droits ; les rapports deviennent des devoirs, et les liens qui nous unissent semblent terminés avec des nœuds coulants.

Cette inquiétude affectueuse, cette jalousie soupçonneuse, contrôleuse, cramponnante des