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Pierre, de plus en plus agacé, répondit en ricanant :

— Cela est peut-être, cependant, plus dangereux pour toi.

Roland, qui allait boire, reposa son verre plein sur la table et demanda :

— Pourquoi donc ?

Depuis longtemps il se plaignait de sa santé, de lourdeurs, de vertiges, de malaises constants et inexplicables. Le docteur reprit :

— Parce que la balle du pistolet peut fort bien passer à côté de toi, tandis que le verre de vin te passe forcément dans le ventre.

— Et puis ?

— Et puis il te brûle l’estomac, désorganise le système nerveux, alourdit la circulation et prépare l’apoplexie dont sont menacés tous les hommes de ton tempérament.

L’ivresse croissante de l’ancien bijoutier paraissait dissipée comme une fumée par le vent ; et il regardait son fils avec des yeux inquiets et fixes, cherchant à comprendre s’il ne se moquait pas.