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montagnes du Forez. Tout cet horizon démesuré est voilé d’une vapeur laiteuse, douce et claire. Les lointains d’Auvergne ont une grâce infinie dans leur brume transparente.

La route est bordée de noyers énormes qui la mettent presque toujours à l’abri du soleil. Les pentes des monts sont couvertes de châtaigniers en fleur dont les grappes, plus pâles que les feuilles, semblent grises dans la verdure sombre. Sur les pics, on voit partout des châteaux en ruine. Cette terre fut hérissée de manoirs guerriers. Tous se ressemblaient d’ailleurs.

Au-dessus d’un vaste bâtiment carré, festonné de créneaux, s’élève une tour. Les murs n’ont pas de fenêtres, rien que des trous presque imperceptibles. On dirait que ces forteresses ont poussé sur les hauteurs comme des champignons de montagne. Elles sont construites en pierre grise, qui n’est autre chose que la lave des anciens volcans, devenue plus noire encore avec les siècles.

Et, tout le long des chemins, on rencontre des attelages de vaches traînant des dômes de foin. Les deux bêtes vont d’un pas lent, dans les descentes et les montées rapides, tirant ou retenant la charge énorme. Un homme marche devant