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mont-oriol

— Non… je ne l’aime pas… mais je fais la chasse aux rastaquouères, voilà…

— Puis-je te demander ce que tu comptes faire ?

— Gifler ce gueux.

— Bon, le meilleur moyen de le faire aimer d’elle. Vous vous battrez, et soit qu’il te blesse, soit que tu le blesses, il deviendra pour elle un héros.

— Alors que ferais-tu ?

— À ta place ?

— À ma place.

— Je parlerais à la petite, en ami. Elle a grande confiance en toi. Eh bien, je lui dirais simplement, en quelques mots, ce que sont ces écumeurs de société. Tu sais très bien dire ces choses-là. Tu as de la flamme. Et je lui ferais comprendre : 1o pourquoi il s’est attaché à l’Espagnole ; 2o pourquoi il a essayé le siège de la fille du professeur Cloche ; 3o pourquoi, n’ayant pas réussi dans cette tentative, il s’efforce, en dernier lieu, de conquérir Mlle Charlotte Oriol.

— Pourquoi ne fais-tu pas cela, toi, qui seras son beau-frère.

— Parce que… parce que… à cause de ce qui s’est passé entre nous… voyons… Je ne peux pas.

— C’est juste. Je vais lui parler.

— Veux-tu que je te ménage un tête-à-tête tout de suite ?

— Mais oui, parbleu.

— Bon, promène-toi dix minutes, je vais enlever Louise et le Mazelli, et tu trouveras l’autre toute seule en revenant.

Paul Brétigny s’éloigna du côté des gorges d’Enval, cherchant comment il allait commencer cette conversation difficile.