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fils Gontran va épouser, dans six semaines ou deux mois, Mlle Louise Oriol.

M. de Ravenel fut effaré :

— Gontran ? Vous dites ?

— Je dis qu’il épousera, dans six semaines ou deux mois, avec votre consentement, Mlle Louise Oriol, qui sera fort riche.

Alors le marquis dit simplement :

— Mon Dieu, si cela lui plaît, je veux bien, moi. Et le banquier raconta sa démarche auprès du vieux paysan.

Aussitôt prévenu par le comte que la jeune fille consentirait, il voulut enlever, séance tenante, l’assentiment du vigneron sans lui laisser le temps de préparer ses ruses.

Il courut donc chez lui, et le trouva faisant, à grand peine, ses comptes sur un bout de papier graisseux, avec l’aide de Colosse qui additionnait sur ses doigts.

S’étant assis :

— Je boirais bien un verre de votre bon vin, dit-il.

Dès que le grand Jacques fut revenu apportant les verres et le broc tout plein, il demanda si Mlle Louise était rentrée ; puis il pria qu’on l’appelât. Quand elle fut en face de lui, il se leva et, la saluant profondément :

— Mademoiselle, voulez-vous me considérer en ce moment comme un ami à qui on peut tout dire ? Oui, n’est-ce pas ? Eh bien, je suis chargé d’une mission très délicate auprès de vous. Mon beau-frère, le comte Raoul-Olivier-Gontran de Ravenel, s’est épris de vous,