Page:Maupassant - Mont-Oriol, Ollendorff, 1905.djvu/299

Cette page a été validée par deux contributeurs.
293
mont-oriol

— C’est à ma sœur qu’il faut dire ça.

— Oh ! Vous savez bien que je ne fais pas de déclaration à votre sœur.

— Allons donc !

— Voyons, vous ne seriez pas femme si vous n’aviez point compris que je me suis montré galant auprès d’elle pour voir ce que vous en penseriez !… et quelle figure vous me feriez ! Vous m’avez fait une figure furieuse. Oh ! que j’ai été content ! Alors j’ai tâché de vous montrer, avec tous les égards possibles, ce que je pensais de vous !…

On ne lui avait jamais parlé ainsi. Elle se sentait confuse et ravie, le cœur plein de joie et d’orgueil.

Il reprit :

— Je sais bien que j’ai été vilain pour votre petite sœur. Tant pis. Elle ne s’y est pas trompée, elle, allez. Vous voyez qu’elle est restée sur la côte, qu’elle n’a pas voulu nous suivre… Oh ! elle a compris, elle a compris !…

Il avait saisi une des mains de Louise Oriol et il lui baisa le bout des doigts doucement, galamment, et en murmurant :

— Comme vous êtes gentille ! Comme vous êtes gentille !

Elle, appuyée contre la paroi de lave, écoutait son cœur battre d’émotion, sans rien dire. La pensée, la seule qui flottait en son esprit troublé, était une pensée de triomphe : elle avait vaincu sa sœur.

Mais une ombre apparut à l’entrée de la grotte. Paul Brétigny les regardait. Gontran laissa retomber d’une façon naturelle la petite main qu’il tenait sur ses lèvres, et il dit :