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mont-oriol

— Je ne te demande pas de conseils… mêle-toi de ce qui te regarde.

Et elles ne se parlèrent plus.

Le père Oriol et Jacques arrivèrent et se mirent à table. Le vieux demanda presque aussitôt :

— Qué-che que vous faites aujourd’hui, petites ?

Charlotte n’attendit point que sa sœur répondît :

Moi, je vais à Royat avec Mme Andermatt.

Les deux hommes la regardèrent d’un air satisfait, et le père murmura avec ce sourire engageant qu’il avait en traitant les affaires avantageuses :

— C’hest bon, ch’est bon.

Elle fut plus surprise de ce contentement secret, deviné dans toute leur allure, que de la colère visible de Louise ; et elle se demanda, un peu troublée : « Est ce qu’ils auraient causé de ça tous ensemble ? »

Aussitôt le repas fini elle remonta dans sa chambre, mit son chapeau, prit son ombrelle, jeta sur son bras un manteau léger, et elle s’en alla vers l’hôtel, car on devait partir dès une heure et demie.

Christiane s’étonna que Louise ne vînt point.

Charlotte se sentit rougir en répondant :

— Elle est un peu fatiguée, je crois qu’elle a mal à la tête.

Et on monta dans le landau, dans le grand landau à six places dont on se servait toujours. Le marquis et sa fille tenaient le fond, la petite Oriol se trouva donc assise entre les deux jeunes gens, à reculons.

On passa devant Tournoël, puis on suivit le pied de la montagne sur une belle route serpentant sous les noyers et les châtaigniers. Charlotte, plusieurs fois, remarqua que Gontran se serrait contre elle, mais avec