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— Que votre beau-frère, qui en a assez de vous prêter de l’argent.

— Alors ?

— Alors, mon cher, le moindre paysan logé dans une de ces huttes, là-bas, est plus riche que vous.

— Parfaitement… et après ?

— Après… après… Si votre père mourait demain, il ne vous resterait plus, pour manger du pain, pour manger du pain, entendez-vous, qu’à accepter une place d’employé dans ma maison. Et ce serait encore là un moyen de déguiser la pension que je vous ferais.

Gontran dit, d’un ton irrité :

— Mon cher William, ces choses-là m’embêtent. Je les sais d’ailleurs aussi bien que vous, et, je vous le répète, le moment est mal choisi pour me les rappeler avec… avec… avec aussi peu de diplomatie…

— Permettez, laissez-moi finir. Vous ne pouvez vous tirer de là que par un mariage. Or, vous êtes un parti déplorable, malgré votre nom qui sonne bien, sans être illustre. Enfin, il n’est pas de ceux qu’une héritière, même israélite, paye d’une fortune. Donc, il faut vous trouver une femme acceptable et riche, ce qui n’est pas très commode…

Gontran l’interrompit :

— Nommez-la tout de suite, ça vaux mieux.

— Soit : une des filles du père Oriol, à votre choix. Et voici pourquoi je vous en parle avant le bal.

— Et maintenant, expliquez-vous plus longuement, reprit Gontran d’une voix froide.

— C’est bien simple. Vous voyez le succès que j’ai obtenu, du premier coup, avec cette station. Or, si j’avais entre les mains, ou, plutôt si nous avions entre