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elle faillit se trouver mal, et, se tournant vers son mari :

— Mon cher Will, je vais être obligée de sortir. J’étouffe !

Le banquier fut désolé. Il tenait avant tout à ce que la fête réussît d’un bout à l’autre sans accroc. Il répondit :

— Fais tous tes efforts pour résister, je t’en supplie, ton départ bouleverserait tout. Tu aurais la salle entière à traverser.

Mais Gontran, placé derrière elle avec Paul, avait entendu. Il se pencha vers sa sœur :

— Tu as trop chaud ? dit-il.

— Oui, j’étouffe.

— Bon. Attends. Tu vas rire.

Une fenêtre était proche. Il s’y glissa, monta sur une chaise et sauta dehors sans être presque remarqué.

Puis il entra dans le café complètement vide, étendit la main sous le comptoir où il avait vu Petrus Martel cacher la fusée de signal, et, l’ayant volée, il courut se cacher dans un massif, puis l’alluma.

La rapide gerbe jaune s’envola vers les nuages en décrivant une courbe et jetant à travers le ciel une longue pluie de gouttes de feu.

Presque aussitôt une formidable détonation éclata sur la montagne voisine et un faisceau d’étoiles s’éparpilla dans la nuit.

Quelqu’un cria dans la salle de spectacle où frémissaient les accords de Saint-Landri : « On tire le feu d’artifice ! »

Les spectateurs les plus proches des portes se levèrent brusquement pour s’en assurer et sortirent à pas légers. Tous les autres tournèrent les yeux vers les