Page:Maupassant - Mont-Oriol, 1887.djvu/72

Cette page n’a pas encore été corrigée

francs, mais je vous prêterai quinze cents francs… parce que… parce que j’aurai peut-être besoin de vous dans quelques jours.

Gontran répliqua, très calme :

— Alors je les accepte comme acompte.

L’autre lui tapa sur l’épaule sans répondre.

Ils arrivaient auprès du parc éclairé par des lampions pendus aux branches des arbres. L’orchestre du Casino jouait un air classique et lent, qui semblait boiteux, plein de trous et de silences, exécuté par les quatre mêmes artistes, exténués de jouer toujours, matin et soir, dans cette solitude, pour les feuilles et le ruisseau, de produire l’effet de vingt instruments, et las aussi de n’être guère payés à la fin du mois, Petrus Martel complétant toujours leur traitement avec des paniers de vin ou des litres de liqueurs que ne consommeraient jamais les baigneurs.

A travers le bruit du concert, on distinguait aussi celui du billard, le heurt de billes et les voix annoncant : « Vingt, vingt et un, vingt-deux. »

Andermatt et Gontran montèrent. Seuls, M. Aubry-Pasteur et le docteur Honorat buvaient leur café à côté des musiciens. Petrus Martel et Lapalme jouaient leur partie acharnée ; et la caissière se réveilla pour demander :

— Qu’est-ce que désirent ces messieurs ?