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l’ordonnance. Elle fut longue, très longue. Puis il revint près du lit et, avec un ton différent, pour bien prouver qu’il avait achevé sa besogne professionnelle et sacrée, il se mit à causer.

Il avait la voix profonde et grasse, une voix puissante de nain trapu ; et des questions se cachaient dans ses phrases les plus banales. Il parla de tout. Le mariage de Gontran semblait l’intéresser beaucoup. Puis, avec son vilain sourire d’être mal fait :

— Je ne vous dis rien encore du mariage de M. Brétigny, bien que ce ne soit plus un secret, car le père Oriol le raconte à tout le monde.

Ce fut en elle une sorte de défaillance qui commença par le bout des doigts, puis envahit tout le corps, les bras, la poitrine, le ventre, les jambes. Elle ne comprenait point cependant ; mais une peur horrible de ne pas savoir la rendit subitement prudente, et elle balbutia :

— Ah ! Le père Oriol le raconte à tout le monde ?

— Oui, oui. Il m’en a parlé à moi-même il n’y a pas dix minutes. Il paraît que M. Brétigny est très riche, et qu’il aime la petite Charlotte depuis longtemps. C’est Mme Honorat, d’ailleurs, qui a fait ces deux unions-là. Elle prêtait les mains et sa maison aux rencontres des jeunes gens…

Christiane avait fermé les yeux. Elle était sans connaissance.

A l’appel du docteur, une femme de chambre accourut ; puis apparurent le marquis, Andermatt