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dant, ne lui avait rien dit ; mais son allure, toutes ses paroles, le ton qu’il prenait avec elle, son air de galanterie plus sérieuse, la caresse de son regard semblaient lui répéter chaque jour : « Je vous ai choisie ; vous serez ma femme. »

Et le ton d’amitié douce, d’abandon discret, de réserve chaste qu’elle avait maintenant avec lui, semblait répondre : « Je le sais, et je dirai « oui » quand vous demanderez ma main. »

Dans la famille de la jeune fille on chuchotait. Louise ne lui parlait plus guère que pour l’irriter par des allusions blessantes, par des paroles aigres et mordantes. Le père Oriol et Jacques semblaient contents.

Elle ne s’était point demandé cependant si elle aimait ce joli prétendant dont elle serait sans doute la femme. Il lui plaisait, elle songeait à lui sans cesse, elle le trouvait beau, spirituel, élégant, elle pensait surtout à ce qu’elle ferait quand il l’aurait épousée.

Dans Enval on avait oublié les rivalités haineuses des médecins et des propriétaires des sources, les suppositions sur l’affection de la duchesse de Ramas pour son protecteur, tous les potins qui coulent avec l’eau des stations thermales, pour ne s’occuper que de cette chose extraordinaire : le comte Gontran de Ravenel allait épouser la petite Oriol.

Alors Gontran jugea le moment venu et prenant Andermatt par le bras, un matin, au sortir de table, il lui dit :

— Mon cher, le fer est chaud, battez-le ! Voici la