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— Je compromets Charlotte ?… Moi ?…

— Oui, tu la compromets. Tout le monde en parle ici, et tantôt encore, dans le parc de Royat, vous avez été bien… bien… légers. N’est-ce pas, Brétigny ?

Paul répondit :

— Oui, Madame, je partage tout à fait votre sentiment.

Gontran tourna sa chaise, l’enfourcha comme un cheval, prit un nouveau cigare, l’alluma, puis se mit à rire.

— Ah ! Donc, je compromets Charlotte Oriol ?

Il attendit quelques secondes pour voir l’effet de sa réponse, puis déclara :

— Eh bien, qu’est-ce qui vous dit que je ne veux pas l’épouser ?

Christiane fit un sursaut de stupéfaction.

— L’épouser ? Toi ?… Mais tu es fou !…

— Pourquoi ça ?

— Cette… cette petite… paysanne…

— Tra la… la… des préjugés… Est-ce ton mari qui te les apprend ?…

Comme elle ne répondait rien à cet argument direct, il reprit, faisant lui-même les demandes et les réponses :

— Est-elle jolie ? — Oui ! — Est-elle bien élevée ? — Oui ! -Et plus naïve, et plus gentille, et plus simple, et plus franche que les filles du monde. Elle en sait autant qu’une autre, car elle parle anglais et auvergnat, ce qui fait deux langues étrangères. Elle sera riche autant qu’une héritière du ci-de-