rent et elle se sentit tellement caressée par le regard passionné dont il l’avait couverte, qu’elle frémit de la tête aux pieds. Elle avait envie, maintenant, une envie folle, irrésistible, de prendre cette main qui jouait dans l’herbe, et de la serrer bien fort pour lui exprimer tout ce qu’on peut dire dans une étreinte. Elle fit glisser la sienne le long de sa robe jusqu’au gazon, puis elle l’y laissa, immobile, les doigts ouverts. Alors elle vit l’autre s’en venir, tout doucement, comme une bête amoureuse qui cherche sa compagne. Elle s’en vint, tout près, tout près, et leurs petits doigts se touchèrent ! Ils se frôlèrent par le bout, doucement, à peine, se perdirent et se retrouvèrent, ainsi que des lèvres qui s’embrassent. Mais cette caresse imperceptible, cet effleurement léger, entrait en elle et si violemment qu’elle se sentait défaillir comme s’il l’avait de nouveau écrasée en ses bras.
Et elle comprit soudain comment on appartient à quelqu’un, comment on n’est plus rien sous l’amour qui vous possède, comment un être vous prend, corps et âme, chair, pensée, volonté, sang, nerfs, tout, tout, tout ce qui est en vous, ainsi que fait un grand oiseau de proie aux larges ailes en s’abattant sur un roitelet.