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dont il faut découvrir une à une les qualités. »

Mais Gontran les rejoignait en courant. Il criait :

— Sœur, hé, Christiane, attends !

Et, lorsqu’il les eut rattrapés, il leur dit, riant encore :

— Oh ! venez donc écouter la petite Oriol, elle est drôle comme tout, elle a un esprit étonnant. Papa a fini par la mettre à son aise, et elle nous raconte les choses les plus comiques de la terre. Attendez-les.

Et ils attendirent le marquis, qui s’en venait avec la cadette des fillettes, Charlotte Oriol.

Elle racontait, avec une verve enfantine et sournoise, des histoires du village, des naïvetés et des roueries de paysans. Et elle les imitait avec leurs gestes, leurs allures lentes, leurs paroles graves, leurs fouchtra, leurs innombrables bougrrre qu’elle prononçait bigrrre, mimant, d’une façon qui rendait charmante sa jolie figure éveillée, tous les mouvements de leurs physionomies. Ses yeux vifs brillaient ; sa bouche, assez grande, s’ouvrait bien, montrant de belles dents blanches ; son nez, un peu relevé, lui donnait un air d’esprit, et elle était fraîche, d’une fraîcheur de fleur à faire frémir d’envie les lèvres.

Le marquis ayant passé presque toute son