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veillance pour ce consommateur obstiné, répétait chaque jour à Parent : « Voyons, monsieur, décidez-vous à prendre l’air ! C’est si joli, la campagne quand il fait beau ! Oh ! moi ! si je pouvais, j’y passerais ma vie ! »

Et elle lui communiquait ses rêves, les rêves poétiques et simples de toutes les pauvres filles enfermées d’un bout à l’autre de l’année derrière les vitres d’une boutique et qui regardent passer la vie factice et bruyante de la rue, en songeant à la vie calme et douce des champs, à la vie sous les arbres, sous le radieux soleil qui tombe sur les prairies, sur les bois profonds, sur les claires rivières, sur les vaches couchées dans l’herbe, et sur toutes les fleurs diverses, toutes les fleurs libres, bleues, rouges, jaunes, violettes, lilas, roses, blanches, si gentilles, si fraîches, si parfumées, toutes les fleurs de la nature qu’on cueille en se promenant et dont on fait de gros bouquets.

Elle prenait plaisir à lui parler sans cesse de son désir éternel, irréalisé et irréalisable ;