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MADAME BAPTISTE

apercevant un enterrement civil, je me suis empressé de le suivre sans connaître, d’ailleurs, le mort que vous accompagnez ». Un des messieurs prononça : « C’est une morte ». Je fus surpris et je demandai : « Cependant c’est bien un enterrement civil, n’est-ce pas ? »

L’autre monsieur, qui désirait évidemment m’instruire, prit la parole : « Oui et non. Le clergé nous a refusé l’entrée de l’église ». Je poussai, cette fois, un « Ah ! » de stupéfaction. Je ne comprenais plus du tout.

Mon obligeant voisin me confia, à voix basse : « Oh ! c’est toute une histoire. Cette jeune femme s’est tuée, et voilà pourquoi on n’a pas pu la faire enterrer religieusement. C’est son mari que vous voyez là, le premier, celui qui pleure ».

Alors, je prononçai, en hésitant : « Vous m’étonnez et vous m’intéressez beaucoup, monsieur. Serait-il indiscret de vous demander de me conter cette histoire ? Si je vous importune, mettez que je n’ai rien dit ».

Le monsieur me prit le bras familièrement : « Mais pas du tout, pas du tout. Tenez, restons un peu derrière. Je vais vous dire ça, c’est fort triste. Nous avons