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MADEMOISELLE FIFI

torité, se réservant de faire le partage en toute justice suivant les grades, pour ne blesser en rien la hiérarchie.

Alors, afin d’éviter toute discussion, toute contestation et tout soupçon de partialité, il les aligna par rang de taille, et s’adressant à la plus grande, avec le ton du commandement : « Ton nom ? »

Elle répondit en grossissant sa voix : « Paméla ».

Alors il proclama : « Numéro un, la nommée Paméla, adjugée au commandant ».

Ayant ensuite embrassé Blondine, la seconde, en signe de propriété, il offrit au lieutenant Otto la grosse Amanda, Éva la Tomate au sous-lieutenant Fritz, et la plus petite de toutes, Rachel, une brune toute jeune, à l’œil noir comme une tache d’encre, une juive dont le nez retroussé confirmait la règle qui donne des becs courbes à toute sa race, au plus jeune des officiers, au frêle marquis Wilhem d’Eyrik.

Toutes, d’ailleurs, étaient jolies et grasses, sans physionomies bien distinctes, faites à peu près pareilles de tournure et de peau par les pratiques d’amour quotidiennes et la vie commune des maisons publiques.

Les trois jeunes gens prétendaient tout de suite