Page:Maupassant - Mademoiselle Fifi, Ollendorff, 1902.djvu/30

Cette page a été validée par deux contributeurs.
17
MADEMOISELLE FIFI

avait enfin sauté ; et chacun ramassa des morceaux de porcelaine, s’étonnant aux dentelures étranges des éclats, examinant les dégâts nouveaux, contestant certains ravages comme produits par l’explosion précédente ; et le major considérait d’un air paternel le vaste salon bouleversé par cette mitraille à la Néron et sablé de débris d’objets d’art. Il en sortit le premier, en déclarant avec bonhomie : « Ça a bien réussi, cette fois ».

Mais une telle trombe de fumée était entrée dans la salle à manger, se mêlant à celle du tabac, qu’on ne pouvait plus respirer. Le commandant ouvrit la fenêtre, et tous les officiers, revenus pour boire un dernier verre de cognac, s’en approchèrent.

L’air humide s’engouffra dans la pièce, apportant une sorte de poussière d’eau qui poudrait les barbes et une odeur d’inondation. Ils regardaient les grands arbres accablés sous l’averse, la large vallée embrumée par ce dégorgement des nuages sombres et bas, et tout au loin le clocher de l’église dressé comme une pointe grise dans la pluie battante.

Depuis leur arrivée, il n’avait point sonné. C’était, du reste, la seule résistance que les envahisseurs eussent rencontrée aux environs : celle du clocher. Le curé ne