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MADEMOISELLE FIFI

blaient s’enfoncer dans une ivresse endormie et triste, dans cette saoulerie morne des gens qui n’ont rien à faire.

Mais le baron, soudain, se redressa. Une révolte le secouait ; il jura : « Nom de Dieu ! ça ne peut pas durer, il faut inventer quelque chose à la fin ».

Ensemble le lieutenant Otto et le sous-lieutenant Fritz, deux Allemands doués éminemment de physionomies allemandes lourdes et graves, répondirent : « Quoi, mon capitaine ? ».

Il réfléchit quelques secondes, puis reprit : « Quoi ? Eh bien, il faut organiser une fête, si le commandant le permet ».

Le major quitta sa pipe : « Quelle fête, capitaine ? »

Le baron s’approcha : « Je me charge de tout, mon commandant. J’enverrai à Rouen Le Devoir, qui nous ramènera des dames, je sais où les prendre. On préparera ici un souper ; rien ne manque d’ailleurs, et, au moins, nous passerons une bonne soirée ».

Le comte de Falsberg haussa les épaules en souriant : « Vous êtes fou, mon ami ».

Mais tous les officiers s’étaient levés, entouraient leur chef, le suppliaient :