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MARROCA

l’emporta dans la pièce voisine, avec toutes mes autres hardes.

Je repris enfin mon assurance et je le lui prouvai de tout mon pouvoir, si bien qu’au bout de deux heures nous ne songions guère au repos, quand des coups violents frappés soudain contre la porte nous firent tressaillir ; et une voix forte d’homme cria : — « Marroca, c’est moi. »

Elle fit un bond : — « Mon mari ! Vite, cache-toi sous le lit ». Je cherchais éperdument mon pantalon ; mais elle me poussa, haletante : — « Va donc, va donc ».

Je m’étendis à plat ventre et me glissai sans murmurer sous ce lit, sur lequel j’étais si bien.

Alors elle passa dans la cuisine. Je l’entendis ouvrir une armoire, la fermer, puis elle revint, apportant un objet que je n’aperçus pas, mais qu’elle posa vivement quelque part ; et, comme son mari perdait patience, elle répondit d’une voix forte et calme : — « Je ne trrrouve pas les allumettes ; » puis soudain : — « Les voilà, je t’ouvrrre. » Et elle ouvrit.

L’homme entra. Je ne vis que ses pieds, des pieds énormes. Si le reste se trouvait en proportion, il devait être un colosse.