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MARROCA

Elle fut huit jours sans se montrer. Le neuvième jour elle reparut, s’arrêta gravement sur le seuil de ma chambre et demanda : « Viendras-tu ce soir dorrrmirrr chez moi ? Si tu ne viens pas, je m’en vais. »

Huit jours, c’est long, mon ami, et, en Afrique, ces huit jours-là valaient bien un mois : Je criai : — « Oui » et j’ouvris les bras. Elle s’y jeta.

Elle m’attendit, à la nuit, dans une rue voisine, et me guida.

Ils habitaient près du port une petite maison basse. Je traversai d’abord une cuisine où le ménage prenait ses repas, et je pénétrai dans la chambre blanchie à la chaux, propre, avec des photographies de parents le long des murs et des fleurs de papier sous des globes. Marroca semblait folle de joie ; elle sautait, répétant :

— « Te voilà chez nous, te voilà chez toi. »

J’agis, en effet, comme chez moi.

J’étais un peu gêné, je l’avoue, même inquiet. Comme j’hésitais, dans cette demeure inconnue, à me séparer de certain vêtement sans lequel un homme surpris devient aussi gauche que ridicule, et incapable de toute action, elle me l’arracha de force et