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M. JOCASTE.

d’autres lèvres, les bras frémissants du besoin de s’ouvrir et d’étreindre.

La lampe voilée de dentelles versait une lumière intime dans le salon silencieux.

Gênés tous deux, ils prononçaient parfois quelques mots, mais quand leurs yeux se rencontraient, une secousse soulevait leurs cœurs.

Que peuvent les sentiments appris contre la violence des instincts ? Que peut le préjugé de la pudeur contre l’irrésistible volonté de la nature ?

Leurs doigts, par hasard, se touchèrent. Et cela suffit. La force brutale des sens les jeta l’un à l’autre. Ils s’étreignirent et elle s’abandonna.

Elle fut grosse. De son amant ou de son mari ? Le pouvait-elle savoir ? Mais de l’amant, sans doute.

Alors une épouvante la harcela ; elle se croyait certaine de mourir en couches, et sans cesse elle faisait jurer à celui qui l’avait ainsi possédée de veiller sur l’enfant durant toute sa vie, de ne lui rien refuser, d’être tout pour lui, tout, et même, s’il le fallait, de commettre un crime pour son bonheur.

Cette obsession touchait à la folie ; elle