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Elle prit sans doute ma stupéfaction pour un consentement, et se précipitant sur la porte intérieure, elle l’ouvrit et cria dans le noir d’un escalier invisible : « Carlotta ! Carlotta ! descends vite, viens tout de suite, ma fille chérie. »

Je voulus protester ; elle ne me le permit pas : « Non, elle vous tiendra compagnie ; elle est très douce, et bien plus gaie que l’autre ; c’est une bonne fille, une très bonne fille que j’aime beaucoup. »

J’entendais sur les marches un bruit de semelles de savates ; et une grande fille parut, brune, mince et jolie, mais dépeignée aussi, et laissant deviner, sous une vieille robe de sa mère, son corps jeune et svelte.

Mme Rondoli la mit aussitôt au courant de ma situation : « C’est le Français de Francesca, celui de l’an dernier, tu sais bien. Il venait la chercher ; il est tout seul, ce pauvre monsieur. Alors, je lui ai dit que tu irais avec lui pour lui tenir compagnie. »

Carlotta me regardait de ses beaux yeux bruns ; et elle murmura en se mettant à sourire : « S’il veut, je veux bien, moi. »

Comment aurais-je pu refuser ? Je déclarai : « Mais certainement que je veux bien. »