Page:Maupassant - Les Sœurs Rondoli.djvu/52

Cette page a été validée par deux contributeurs.

de rencontres et de hasards ? Je cherchais en vain à la comprendre, à la pénétrer, à l’expliquer. Plus je la connaissais, plus elle m’étonnait, m’apparaissait comme une énigme. Certes, elle n’était point une drôlesse, faisant profession de l’amour. Elle me paraissait plutôt quelque fille de pauvres gens, séduite, emmenée, puis lâchée, et perdue maintenant. Mais que comptait-elle devenir ? Qu’attendait-elle ? car elle ne semblait nullement s’efforcer de me conquérir ou de tirer de moi quelque profit bien réel.

J’essayai de l’interroger, de lui parler de son enfance, de sa famille. Elle ne me répondit pas. Et je demeurais avec elle, le cœur libre et la chair tenaillée, nullement las de la tenir en mes bras, cette femelle hargneuse et superbe, accouplé comme une bête, pris par les sens, ou plutôt, séduit, vaincu par une sorte de charme sensuel, un charme jeune, sain, puissant qui se dégageait d’elle, de sa peau savoureuse, des lignes robustes de son corps.

Huit jours encore s’écoulèrent. Le terme de mon voyage approchait, car je devais être rentré à Paris le 11 juillet. Paul, maintenant, prenait à peu près son parti de l’aventure, tout en m’injuriant toujours. Quant à moi, j’inventais des plaisirs, des distractions, des