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drement dans mes bras (le vin étant tiré, j’eusse été bien sot de n’en plus boire) et je posai lentement mes lèvres sur ses grands yeux fâchés qu’elle fermait, avec ennui, sous mes baisers, sur ses joues claires, sur ses lèvres charnues qu’elle détournait.

Je lui dis : « Vous n’aimez donc pas qu’on vous embrasse ? »

Elle répondit : « Mica. »

Je m’assis sur la malle à côté d’elle, et passant mon bras sous le sien : « Mica ! mica ! mica ! pour tout. Je ne vous appellerai plus que mademoiselle Mica. »

Pour la première fois, je crus voir sur sa bouche une ombre de sourire, mais il passa si vite que j’ai bien pu me tromper.

— Mais si vous répondez toujours « mica » je ne saurai plus quoi tenter pour vous plaire. Voyons, aujourd’hui, qu’est-ce que nous allons faire ?

Elle hésita comme si une apparence de désir eût traversé sa tête, puis elle prononça nonchalamment : « Ça m’est égal, ce que vous voudrez. »

— Eh bien, mademoiselle Mica, nous prendrons une voiture et nous irons nous promener.

Elle murmura : « Comme vous voudrez. »