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pour faire une partie sur la terre. C’étaient des lucioles, ces mouches ardentes dansant dans l’air parfumé un étrange ballet de feu.

Une d’elles, par hasard, entra dans notre wagon et se mit à vagabonder jetant sa lueur intermittente, éteinte aussitôt qu’allumée. Je couvris de son voile bleu notre quinquet et je regardais la mouche fantastique aller, venir, selon les caprices de son vol enflammé. Elle se posa, tout à coup, dans les cheveux noirs de notre voisine assoupie après dîner. Et Paul demeurait en extase, les yeux fixés sur ce point brillant qui scintillait, comme un bijou vivant, sur le front de la femme endormie.

L’Italienne se réveilla vers dix heures trois quarts, portant toujours dans sa coiffure la petite bête allumée. Je dis, en la voyant remuer : « Nous arrivons à Gênes, madame. » Elle murmura sans me répondre, comme obsédée par une pensée fixe et gênante : « Qu’est-ce que je vais faire maintenant ? »

Puis, tout d’un coup, elle me demanda :

— Voulez-vous que je vienne avec vous ?

Je demeurai tellement stupéfait que je ne comprenais pas.

— Comment, avec nous ? Que voulez-vous dire ?