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Il pâlit : « J’ai quarante-cinq ans. » Puis il ajouta : « J’ai oublié de vous demander des nouvelles de la princesse de Raynes. Vous la voyez toujours ? »

Elle lui jeta un regard de haine : « Oui, toujours. Elle va fort bien — merci. »

Et ils demeurèrent côte à côte, le cœur agité, l’âme irritée. Tout à coup il déclara : « Ma chère Berthe, je viens de changer d’avis. Vous êtes ma femme, et je prétends que vous reveniez aujourd’hui sous mon toit. Je trouve que vous avez gagné en beauté et en caractère, et je vous reprends. Je suis votre mari, c’est mon droit. »

Elle fut stupéfaite, et le regarda dans les yeux pour y lire sa pensée. Il avait un visage impassible, impénétrable et résolu.

Elle répondit : « Je suis bien fâchée, mais j’ai des engagements. »

Il sourit : « Tant pis pour vous. La loi me donne la force. J’en userai. »

On arrivait à Marseille ; le train sifflait, ralentissant sa marche. La baronne se leva, roula ses couvertures avec assurance, puis se tournant vers son mari : « Mon cher Raymond, n’abusez pas d’un tête-à-tête que j’ai préparé. J’ai voulu prendre une précaution,