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ravissait les yeux. Ses longues mains, sa joue, son cou, étaient d’une blancheur et d’une finesse exquises ; c’était là de la chair fine et noble, de la chair de race. Et elle marchait toujours avec ce long mouvement de chaloupe comme si chaque jambe, à chaque pas, eût légèrement fléchi.

René l’embrassa sur le front, fraternellement et demanda : « Lucien n’est pas encore arrivé ? »

Elle répondit, d’une voix claire et légère :

« Non, pas encore, mon ami. Tu sais qu’il est toujours un peu en retard. »

Le timbre retentit. Un grand garçon parut, fort brun, avec des joues velues et un aspect d’hercule mondain. On nous présenta l’un à l’autre. Il s’appelait : Lucien Delabarre.

René et lui se serrèrent énergiquement les mains. Et puis on se mit à table.

Le dîner fut délicieux, plein de gaieté. René ne cessait de me parler, familièrement, cordialement, franchement, comme autrefois. C’était : « Tu sais, mon vieux. Dis donc, mon vieux. Écoute, mon vieux. — Puis soudain il s’écriait : « Tu ne te doutes pas du plaisir que j’ai à te retrouver. Il me semble que je renais. »