Page:Maupassant - Les Sœurs Rondoli.djvu/186

Cette page a été validée par deux contributeurs.

établit entre deux êtres, même quand ils ont cessé de s’aimer, une sorte de complicité, d’alliance mystérieuse. Ils sont, l’homme et la femme, comme deux associés discrets qui se défient de tout le monde. Mais ce lien si serré, que noue le baiser conjugal, cesse brusquement du jour où la femme prend un amant.

Je me rappelle comme d’hier toute la cérémonie du mariage de Blérot. Je n’avais pas voulu assister au contrat, ayant peu de goût pour ces sortes d’événements ; j’allai seulement à la mairie et à l’église.

Sa femme, que je ne connaissais point, était une grande jeune fille blonde, un peu mince, jolie, avec des yeux pâles, des cheveux pâles, un teint pâle, des mains pâles. Elle marchait avec un léger mouvement onduleux, comme si elle eût été portée par une barque. Elle semblait faire en avançant une suite de longues révérences gracieuses.

Blérot en paraissait fort amoureux. Il la regardait sans cesse, et je sentais frémir en lui un désir immodéré de cette femme.

J’allai le voir au bout de quelques jours. Il me dit : « Tu ne te figures pas comme je suis heureux. Je l’aime follement. D`ailleurs elle est… elle est… » Il