Page:Maupassant - Les Sœurs Rondoli.djvu/125

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Cette fois j’éclatais. « Ah ! oui, vous êtes des malins ! Si vous me dites que la franc-maçonnerie est une usine à élections, je vous l’accorde ; qu’elle sert de machine à faire voter pour les candidats de toutes nuances, je ne le nierai jamais ; qu’elle n’a d’autre fonction que de berner le bon peuple, de l’enrégimenter pour le faire aller à l’urne comme on envoie au feu les soldats, je serai de votre avis ; qu’elle est utile, indispensable même à toutes les ambitions politiques parce qu’elle change chacun de ses membres en agent électoral, je vous crierai : « C’est clair comme le soleil ! » Mais si vous me prétendez qu’elle sert à saper l’esprit monarchique, je vous ris au nez.

« Considérez-moi un peu cette vaste et mystérieuse association démocratique, qui a eu pour grand-maître, en Allemagne, le prince héritier ; en Russie, le frère du czar ; dont font partie le roi Humbert et le prince de Galles, et toutes les caboches couronnées du globe ! »

Cette fois mon oncle me glissait dans l’oreille : « C’est vrai, mais tous ces princes servent nos projets sans s’en douter. »

— Et réciproquement, n’est-ce pas ?

Et j’ajoutais en moi : « Tas de niais ! »