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ÉTRENNES

— Bien vrai ?

— Oui.

— Alors, garde-moi.

Il s’écria :

— Te garder ? Chez moi ? Ici ? Mais tu es folle ! ce serait te perdre à tout jamais ; te perdre sans retour ! Tu es folle !

Elle reprit, lentement, avec gravité, en femme qui sent le poids de ses paroles :

— Écoutez, Jacques. Il m’a défendu de vous revoir et je ne jouerai pas cette comédie de venir chez vous en cachette. Il faut, ou me perdre, ou me prendre.

— Ma chère Irène, dans ce cas-là, obtenez votre divorce et je vous épouserai.

— Oui, vous m’épouserez dans… deux ans au plus tôt. Vous avez la tendresse patiente.

— Voyons, réfléchissez. Si vous demeurez ici, il vous reprendra demain, puisqu’il est votre mari, puisqu’il a pour lui le droit et la loi.

— Je ne vous demandais pas de me garder chez vous, Jacques, mais de m’emmener n’importe où. Je croyais que vous m’aimiez assez pour cela. Je me suis trompée. Adieu.